Programme DE SALLE
LA VIE PARISIENNE
Dimanche 12 janvier 2025 · 16h00
Mardi 14 janvier 2025 · 20h00
Mercredi 15 janvier 2025 · 20h00
Salle Colonne
DISTRIBUTION
Bobinet, Paul Germanaz / Marius Valero
Raoul de Gardefeu, Ulysse Timoteo / Grégoire Mary
Baron de Gondremarck, Alexandre Munsch / Alexandre Selvestrel
Baronne de Gondremarck, Héloïse Venayre
Brésilien, Nolo Calage
Frick, Félix Orthmann Reichenbach
Gabrielle/Madame de Sainte Amarante, Eve Nikolaidis / Valentine Bacquet
Prosper, Samuel Nouet
Urbain-Alfred, Arthur Dougha
Joseph/Alphonse, Jules Jovignot / Alexandre Martin
Gontran, Marc-Eden Lemaire
Metella, Mathilde Marin / Fiona Vandenbesselaer
Pauline, Anaïs Carde / Clélia Horvat
Joséphine/Mme de Folle Verdure, Léa Hassoun
Léonie/Madame la Vicomtesse de la Pépinière, Kristina Perkovic
Louise/Madame la Baronne de la Haute -Venue, Fiona Vandenbesselaer / Mathilde Marin
Clara/Marquise de la Farandole, Fantine Sevic
Julie/La Comtesse de Valangoujar, Clémence Hausermann
Caroline/La Marquise de la Butte-Jonvel, Jules Jovignot
Augustine/Madame la Baronne de Galuchet, Clélia Horvat- Anais Carde
Lola/Madame de la Chapelle saint Blaise, Mona Rossi
Invités acte II
Nolo Calage, Matteo Caradot, Gabrielle Duthoit, Léa Hassoun, Jules Jovignot, Marc Eden Lemaire, Alexandre Martin, Samuel Nouet, Kristina Perkovic, Nafsika Prantzos, Noé Pupponi, Mona Rossi, Fantine Sevic, Arwen Tanguy
Invitées acte III
Anaïs Carde/Clélia Horvat, Léa Hassoun, Clémence Hausermann, Jules Jovignot, Kristina Perkovic, Fiona Vandenbesselaer/Mathilde Marin, Mona Rossi, Fantine Sevic
Acte IV
Garçons de café – Nolo Calage, Matteo Caradot, Jules Jovignot, Marc-Eden Lemaire, Alexandre Martin Samuel Nouet, Noé Pupponi
Orchestre Colonne
Pierre-Louis de LAPORTE · direction
PRÉSENTATION
Illustration de Georges Mouton
La première opérette que Florence Guignolet et ses jeunes chanteurs avaient présentée ici, il y a 3 ans, Salle Colonne, était La Chauve-Souris de Johann Strauss. En ouvrant l’année 2025 avec La Vie Parisienne (de Jacques Offenbach), c’est une manière de boucle qui se boucle. Pourquoi ?
Est-ce parce-que Offenbach est regardé (avec Hervé) comme le père fondateur de l’opérette ? Oui, mais pas seulement…
En réalité, la Chauve-Souris – chef-d’œuvre absolu du répertoire viennois – n’existerait pas sans l’insistance de Jacques Offenbach, ni sans l’influence de sa Vie Parisienne. Transportons-nous à Vienne vers l’année 1860 : Offenbach n’a inauguré son 1er théâtre parisien que depuis 5 ans, mais sa musique commence déjà à être jouée à Vienne (au Carltheater). On y joue aussi bien ses premiers ouvrages en un acte que des opérettes plus ambitieuses (telle Orphée aux Enfers, créée à Paris en 1858). Le compositeur est même invité à se rendre régulièrement à Vienne, seul ou accompagné de sa troupe parisienne (qui donne plusieurs dizaines de représentations au Treumanntheater). C’est au début de l’année 1864 que Johann Strauss Junior rencontre Offenbach pour la première fois. Les deux hommes cultivent l’un pour l’autre une admiration réciproque, et c’est à cette occasion qu’Offenbach aurait conseillé à Strauss d’écrire des opérettes. A cette époque, Strauss ne songeait pas du tout à mettre sa plume au service d’une scène lyrique : l’orchestre symphonique, auquel il destinait ses valses, polkas et quadrilles, suffisait à son bonheur (lui donnant même le sentiment que l’écriture instrumentale constituait sa voie – ou sa voix – naturelle). Mais… les tournants décisifs de la vie musicale trouvent parfois leur origine dans de simples événements d’ordre privé… Ainsi, en 1862, Johann Strauss épouse Henrietta Treffz, une chanteuse (mezzo-soprano) très connue à Vienne et en Angleterre. Et c’est elle qui, relayant les conseils prodigués par Jacques Offenbach, persuada son mari de composer des opérettes. En 1871, Strauss fait représenter au Theater an der Wien son 1er ouvrage lyrique, Indigo et les 40 Voleurs (clairement influencé par le style Offenbach), suivi en 1873 de Carnaval à Rome. Ces 2 ouvrages n’ayant remporté qu’un modeste succès, Strauss est sur le point de mettre un terme à sa carrière de compositeur lyrique.
Et puis… Maximilien Steiner, le directeur du Theater an der Wien, pressa Strauss de composer une nouvelle opérette (basée sur une pièce de théâtre française, Le Réveillon).
Et puis… Strauss se remémora le formidable succès de Pariser Leben (traduction allemande de la Vie Parisienne) qui avait conquis Vienne et Berlin. Et puis… Strauss se souvint des encouragements d’Offenbach, prit la Pariser Leben comme modèle, et finit par se laisser convaincre… C’est ainsi que naquit en 1874 la merveilleuse Chauve-Souris, composée fiévreusement en 40 jours seulement.
Détail amusant : la pièce française – Le Réveillon – qui servit de base au synopsis de Chauve-Souris fut écrite en 1872 par… Meilhac et Halévy (les librettistes attitrés d’Offenbach). Là encore, une manière de boucle se boucle.
A la lumière de ces charmantes péripéties, dévoilant l’extraordinaire influence d’Offenbach sur la vie musicale viennoise, on devine que la Vie Parisienne fut un succès colossal… et ce dès sa création (en octobre 1866) au Théâtre du Palais-Royal.
Que de chemin parcouru depuis l’année 1855 !… année qui avait vu Offenbach acquérir son 1er théâtre (la Salle Lacaze, située sur l’avenue des Champs-Elysées) pour y faire représenter ses premiers ouvrages (en un acte, avec 3 chanteurs seulement). De fait, dès le début de l’aventure, Offenbach avait eu le flair de s’attacher quelques personnalités remarquables, lesquelles lui resteront toujours fidèle : le librettiste Ludovic Halévy d’abord (Henri Meilhac, doté d’un humour et d’un esprit délicieusement aiguisés, rejoindra la petite équipe quelques années plus tard), puis la charismatique soprano Hortense Schneider (alors âgée de 22 ans seulement, arborant « un sourire vainqueur et des yeux fripons, à ce point de damner un archevêque » – disait Gustave Claudin, journaliste au Figaro). Tout Paris, et même quelques têtes couronnées étrangères, se pressait aux spectacles d’Offenbach pour admirer la beauté et le talent magnétique de la ravissante Hortense. Emile Zola lui-même s’inspira de Hortense Schneider pour élaborer son personnage Nana.
Mais soyons juste : la belle Hortense ne constituait pas le seul attrait des opérettes composées par Offenbach. La musique de ce compositeur allemand devenu ‘’si parisien’’, enjouée, vive, alerte, émaillée d’irrésistibles mélodies, réhaussée par les livrets brillants de Halévy et Meilhac – truffés de verve et de bons mots d’esprit – réjouissait un public toujours plus nombreux qui ne cherchait qu’à s’amuser. De plus, l’opérette (sorte de croisement entre l’opéra-comique et le vaudeville) était un genre nouveau qu’Offenbach faisait naitre sous sa plume, et que chaque œuvre nouvelle venait embellir… Le public découvrait un divertissement jamais entendu auparavant. Evidemment, tout ceci suscitait un engouement qui venait remplir les salles : la Salle Lacaze, puis les Bouffes-Parisiens (situés près du Passage Choiseul, dans le 2ème arrondissement), mais aussi le Théâtre du Palais-Royal ou le Théâtre des Variétés.
Au fait, pourquoi l’opérette est-elle née ? Quel est l’élément déclencheur qui lui permit de voir le jour ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire d’avoir à l’esprit les deux genres majeurs qui se disputaient les faveurs du public jusqu’au milieu du XIXème siècle, à savoir l’opéra et l’opéra-comique : l’opéra est une œuvre lyrique chantée d’un bout à l’autre (depuis sa naissance sous la plume de Monteverdi), alors que l’opéra-comique est un ouvrage dans lequel des scènes parlées viennent s’insérer entre des numéros musicaux. Voilà la principale différence. Seulement, dans le terme ‘’opéra-comique’’, il y a le mot ‘’comique’’ (lequel renvoie à la notion de comédie, mais également à la présence de sujets légers, avec un dénouement heureux et des dialogues propres à susciter le rire). Or, le genre opéra-comique a subi peu à peu une manière de glissement, délaissant l’aspect humoristique pour s’orienter vers des sujets de plus en plus dramatiques (Carmen, en 1875, constituera l’apogée de cette dérive). Ainsi, une partie du public, désireux d’assister à des spectacles légers, ne trouvait plus son compte… D’où l’émergence de l’opérette, destinée à combler cette attente et le vide laissé par l’opéra-comique.
Jacques Offenbach (portrait de Nadar vers 1850)
En 1866, Offenbach avait déjà à son actif des succès tels que Ba-ta-clan (créé en 1855), Orphée aux Enfers (1858), Monsieur Choufleuri restera chez lui (1861), La Belle-Hélène (1864) ou Barbe-bleue (créé en 1866, quelques mois avant La Vie Parisienne).
Une date (et une œuvre) en particulier revêt une importance primordiale : l’année 1858 durant laquelle Offenbach, grâce à l’appui du Duc de Morny, obtiendra l’autorisation de s’affranchir des restrictions en vigueur à l’époque, restrictions qui imposaient aux ouvrages légers de ne mettre en scène que 3 personnages au maximum (sur la durée d’un acte unique). Libéré de cette contrainte, Offenbach pourra donc donner naissance à un ouvrage de grande envergure : Orphée aux Enfers. L’année 1864 sera également une date décisive, le décret sur la liberté des théâtres venant abolir toute contrainte (permettant désormais au compositeur de donner libre cours à ses envies et son imagination). Ainsi, la Vie Parisienne comprend 6 rôles principaux, un chœur, un large effectif instrumental et une foule de rôles secondaires (dont certains se voient confié un air soliste, tel celui du bottier Frick déguisé en ‘’Major de table d’hôte’’, ou un duo, tel celui qui unit le Baron de Gondremarck à la soubrette Pauline).
D’abord conçue en 5 actes, l’œuvre sera révisée en 1873 et ramenée à 4 actes. C’est cette version de 1873 qui s’est durablement imposée sur les scènes françaises et les théâtres étrangers.
L’intrigue de Vie Parisienne – d’une simplicité désarmante – peut tenir en 3 phrases : deux jeunes dandys passent leurs journées à collectionner les maîtresses et s’étourdir de plaisir… parfois même jusqu’à se lancer des paris amicaux. Ainsi, l’un des deux – Raoul de Gardefeu – se met en tête de séduire une baronne suédoise venue passer quelques vacances à Paris en compagnie de son mari (également friand de plaisirs frivoles). L’autre dandy, Bobinet, va donc s’employer à éloigner le mari pour laisser à son ami Raoul la possibilité de conquérir la baronne… Sur cette trame, le trio Offenbach/Meilhac/Halévy vont tisser un enchevêtrement de situations cocasses qui débouche sur un irrésistible vertige !
Mes amis, vous avez bien raison de venir vous amuser… Je vous souhaite un joyeux spectacle !
Jean-Noël Ferrel